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Moolight Shadow (Luan)

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Nympheas Oppenheimer
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Pourquoi est-ce que ses témoignages d’une époque révolue pouvaient être gênants pour un mortel ? Parce qu’il se mettait à leur place, être renvoyé à sa mortalité, ça ne devait pas être simple. Il avait craint la mort quand il était jeune. Peut-être même plus que tous les terrestres d’aujourd’hui. Il avait craint les maladies sans même savoir par quoi elles étaient causés. Comme on craint une malédiction inexplicable alors… Oui, il se disait que ça devait déranger certains terrestres, et autres créatures mortelles que d’être renvoyés l'inéluctable fin. Même lui, en tant qu 'immortel, avait peur de la mort. Il avait passé des siècles à jouer à cache-cache avec elle. Il n’en avait pas moins peur. Elle était juste moins inéluctable.

Je ne sais pas… J’ai l’impression que ça pourrait être dérangeant…” Il pouffa à sa remarque sur l’inspiration divine qu’il aurait pu donner à Mozart. “Il n’avait hélas pas besoin de moi pour être un génie ! C’est terrible, mais je dois avouer que je n’ai été d’aucune utilité dans cette affaire !

La suite arracha un froncement de sourcils à Nympheas. Des miettes ? Oh non. Des éclats lumineux. Des étoiles qui disparaissaient bien trop vite de son existence.

Je ne crois vraiment pas que les mortels soient des miettes. Ou alors nous ne sommes que des vieux croûtons.

Il valait mieux en plaisanter que de vraiment dire ce qu’il avait sur le coeur à un inconnu rencontré quelques minutes plus tôt. Nul doute qu’il aurait eu bien des choses à raconter. La détresse de voir ceux qu’on aime disparaître. La sensation d’impuissance face aux horreurs de la vie. Mais il ne parlerait pas de cela. Il suivit le mouvement.

Hm… Je crois que le plat que je maîtrise le mieux, c’est la blanquette ! Une spécialité française ! Mais actuellement, je travaille au Mystic Café, alors je m’adapte à la carte ! J’aime beaucoup la pâtisserie. A l’occasion, je pourrai t’échanger quelques cours contre quelques uns de guitare !” dit-il avec un regain d’entrain.

Jusqu’à ce qu’ils s’arrêtent. Sans doute étaient-ils arrivés devant sa demeure ? C’est ce qu’il pensa de prime abord. Jusqu’à ce que Luan n’explique un peu mieux cet arrêt. Oh. Il acquiesça. Pas vraiment vexé. Il pouvait comprendre que l’on soit méfiant après tout. Cette terre n’est pas peuplé que de gens bien intentionnés. Et Lui-même avait pu lors de sa longue vie osciller des deux côtés de la frontière entre le bien et le mal. Alors… Il comprenait. Même si vraiment, Luan n’avait rien à craindre de lui, vraiment.

Eh bien… Je vais retenir que tu me trouves captivant de tout cela !

Il eut un rire un peu amusé. Et peut-être un peu charmé. Il en fallait peu pour faire chavirer son vieux cœur à peine vivant.

Je te confirmerai ma venue, ne t’en fais pas.” Il sourit. “Et juste… Tu es au courant que les sorciers ont des sorts de localisation ? Si je voulais vraiment te trouver…” Il eut un petit rire. “Crois-bien que j’y arriverai. Mais c’est aussi bien de garder du mystère lors d’une première rencontre ! Alors je ne vous volerai rien pour vous localiser ensuite !

Il lui fit un petit clin d'œil, amusé par la situation.

Belle soirée à vous deux ! Et à jeudi ! Je ne m’attendais pas à entendre une salsa très joyeuse, ne t’inquiète pas !

Il appela Bolt d’un petit claquement de langue, et ouvrant un portail, quitta sa nouvelle rencontre. Après tout, c’était important de garder du mystère ! Enfin, il ne marcha pas trop vite vers son portail… On sait jamais si son charme faisait changer le bad boy d’avis…


SHADOWHUNTERS :  FALLEN BROTHERS | 2023
Luan Orozco
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@Nympheas Oppenheimer  | septembre 2022




Ses commentaires sur Mozart me laissent songeur un court instant. J'ai du mal à croire qu'aucun sorcier ne soit jamais intervenu dans ses réussites à la chaîne et son incroyable existence, mais après tout pourquoi pas. Les terrestres sont aussi capables du meilleur, comme du pire. Il faut bien reconnaître que le génie n'est pas qu'une histoire de diablerie. C'est même plutôt rassurant de le constater et d'y croire. Je ricane doucement à sa comparaison entre les miettes de nos existences et leur statut de vieux croûtons. L'analogie plutôt bien trouvée est à mon goût et s'ajoute à toutes les autres petites poussière étincelantes qui viennent masquer mon habituelle aversion envers les gens de sa race.
Je suis encore en train de réfléchir à sa proposition d'échanges de cours lancée en l'air quand je m'arrête pour reprendre la parole et lui expliquer mes réticences à le faire avancer plus loin vers mon habitation pour le moment. Cet homme me perturbe, pour bien des raisons, et sa réaction plus que positive à plusieurs de mes attitudes négatives est réellement parvenu à se frayer un chemin vers une considération curieuse d'en savoir plus sur lui. Est-il sincère quand il me propose des cours de cuisine contre des cours de guitare ? Ou bien cherche-t-il très habilement à me faire baisser ma garde pour mieux me rendre un piège ? Je ne peux pas entièrement mettre cette hypothèse de côté. Ce serait une machination que j'aurais pu être capable de mettre en plus moi-même pour approcher une de mes cibles. A l'époque. « Eh bien… Je vais retenir que tu me trouves captivant de tout cela ! » Il rigole et mes joues se teintent sensiblement, une fois de plus. Marica. Cela devient rageant de sentir mon corps m'échapper de façon aussi puérile face à un vieux croûton. Je voudrais me forcer à me voir ainsi, à appliquer la réalité des siècles qui nous séparent pour rendre son regard amusé moins magnétique. Mais le mien ne fait que s'intensifier en réponse sous l'effort mental pour tenter de rester de marbre. « Je te confirmerai ma venue, ne t’en fais pas. Et juste… Tu es au courant que les sorciers ont des sorts de localisation ? Si je voulais vraiment te trouver…Crois-bien que j’y arriverai. Mais c’est aussi bien de garder du mystère lors d’une première rencontre ! Alors je ne vous volerai rien pour vous localiser ensuite ! » Je hausse les épaules. Il a tort, évidemment, faire protéger mon appartement par un sorcier contre de potentiels sorts de localisation avait été une de mes priorités en emménageant à Alicante. Se payer les services d'un sorcier pour retrouver quelqu'un comme moi c'est aussi naturel pour ceux qui voudraient me chercher que pour moi de m'en prémunir. Cependant il n'a pas totalement tort, le sort échangé contre plusieurs services n'a pas été renouvelé cette année, son intensité doit être amoindrie, mais c'est un désagrément contre lequel je travaille ardemment aujourd'hui. Si les années précédentes j'obtenais cette faveur en échange de plusieurs petites missions de retour sur investissement, la somme - exorbitante - annoncée par la sorcière qui l'avait fait était largement au dessus de mes moyens monétaires. J'avais tenté de changer le marché, mais visiblement cela lui avait déplu. Je peux comprendre qu'elle perde au change. Quand elle m'avait contacté la première fois pour user de mes lames pour rappeler ses dettes à un client trop stupide pour les payer à temps, elle avait été plutôt très satisfaite du résultat et avait moyenné plusieurs autres interventions du genre contre son sceau de protection pour mon appartement. Que je lui propose de remplacer ce travail utile par quelque chose d'aussi commun que de l'argent n'était pas de son goût. Tant pis. Pour l'instant le problème n'a pas de solution, mais j'ai d'autres sujets à traiter en priorité. Et tout cela ne le regarde pas. Tout cela est la face sombre rattachée au loup qui sommeille, profond dans mes entrailles, bien que toujours trop prompt à se manifester.

Je l'entends me saluer avant de se détourner et d'ouvrir un portail à quelques pas de nous. Bolt, rappeler d'un son trottine vers lui. Mes yeux le suivent et mes mains plongent dans mes poches machinalement. Pourtant je ne détourne pas les talons à mon tour, suivant la lenteur de ses pas avec un étrange sentiment d'attente de quelque chose qui ne vient pas. Seule Pola jappe doucement contre mon mollet en direction du chien à trois pattes comme un dernier et joyeux à bientôt qui résonne dans mes fibres. C'est alors que je m'élance derrière lui dans un « Eh attend ! » Qui oscille entre empressement et exaspération pour cacher ma perplexité. « Attends, prends ça avant de partir. » Le ça n'est autre la carte que je sors de ma poche, tentant le plus naturellement possible de cacher la soudaine nervosité qui grignote mes muscles. La fameuse carte, écornée sous l'action de mes doigts dans mes hésitations précédentes. La fameuse carte inscrite d'un nom et d'un horaire. La meilleure façon de m'en débarrasser, et de trancher, pour cette fois. D'un coup d'épaule je fais glisser l'étui de guitare pour ouvrir la poche de devant, fouiller, et tirer un stylo avec lequel j'ai l'habitude d'écrire quelques compositions quand l'inspiration se fait sentir. Mes gestes sont rapides, presque raides, quand je raye l'information inutile avant d'inscrire quelques chiffres sur l'autre face de la carte blanche. En quelques pas j'ai rejoint Nympheas, le regard calme et la mâchoire à peine contractée, comme si ce n'était là qu'un geste ordinaire. « C'est mon numéro, si jamais Bolt a envie de retourner se promener avec une copine un de ces jours. Ou si tu veux prendre un cours de guitare. N'hésite pas. C'est moins flamboyant qu'un message de feu, mais ça peut avoir son utilité. » L'éclat d'un rire narquois roule dans ma gorge, avant que je ne me détourne pas pour de bon après un dernier regard brillant vers le portail ouvert qui scintille derrière lui. J'ai toujours été impressionné par ceux-là, la fracture de l'espace-temps, la beauté des contours, la facilité avec laquelle il semble l'avoir créé en un tour de main. « A jeudi alors. Et puis tu pourras t'amuser à tenter de me localiser si tu veux. Tu pourrais être surpris. » Je lance ces derniers mots par-dessus mon épaule avant de tracer ma route sans un regard en arrière, appelant Pola d'un nouveau sifflement mélodieux. L'invitation à tenter son sortilège de localisation est véridique, bien que je ne sois pas certain qu'il s'en empare. Cela me permettrait au moins de jauger de son efficacité restante. Le reste est laissé à l'avenir. Peut-être bien que d'ici jeudi, j'aurais réussi à glaner ou une deux informations sur ce fameux Nympheas. L'avantage de faire du service, on côtoie beaucoup de personnes, et les gens sont souvent disposés à aimer raconter toutes sortes d'anecdotes sur eux et sur les autres.




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Nympheas Oppenheimer
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Eh attends !

Oh wow ! C’était inespéré ! Il en avait envie mais on ne peut pas s’assurer qu’on a fait son petit effet ! Il s’arrêta immédiatement, tournant vers le jeune homme un regard curieux. Il sourit. Il n’espérait pas tant ! Comme quoi, il ne faut jamais penser qu’on a pas ses chances ! Enfin, il n’est pas certain que l’homme ait un intérêt autre que pour les cours de cuisine ou les promenades pour Pola mais… Hey, c’est déjà ça ! Nympheas était toujours pour quelques contacts de plus !

Merci… C’est vrai que c’est moins théâtral, mais je m’y suis mis ! A jeudi alors ! Je verrai si j’ai le temps de te stalker d’ici là !

Il ponctua cela d’un clin d’oeil et passa au travers de son portail, plus heureux que lorsqu’il était parti de chez lui.

Le jeudi arriva plus vite qu’il ne l’aurait cru. Il était impatient. C’était fou comme il se réjouissait de ce concert, pourtant, il en avait vu des tas mais… Hey, on ne se refait pas ! Il ne pouvait s’empêcher de ressentir une petite étincelle de curiosité, d’intérêt et peut-être d’attirance pour ce bad boy latino. Coeur d’artichaut un jour, coeur d’artichaut toujours, hein. Il s’était retrouvé à se poser mille questions. Est-ce que cette impatience était partagé ? Ou est-ce que Luan n’avait été que poli ? Est-ce qu’il devait faire un effort pour sa tenu ? Est-ce qu’il devait envoyer un message avant ? Comment on fait maintenant ? est-ce qu’il en faisait encore trop ? Est-ce qu’il était en train de s’emballer pour rien ? Oui, sûrement, comme toujours. Mais… C’était si grisant de se sentir un peu plus vivant que d’habitude, de casser le début de monotonie qui s’était installé depuis qu’il était arrivé à Alicanthe. Il se décida à faire un petit message quand même pendant une pause au Mystic Café. Avant de le ponctuer d’une précision. Et voilà, il se sentait un peu bête. Tant pis ! Il avait du pain sur la planche, ça mettrait peut-être son cerveau en pause. Bon le verdict fut pas tant que ça.

Quelques passages de portails plus tard, il était chez lui à se demander une nouvelle fois comment s’habiller pour le concert chez les loups. Il n’avait pas forcément envie d’attirer l’attention, mais en même temps, il savait qu’il passait rarement inaperçu alors… Autant en jouer, non ? Il n’en sait rien. Il ne sait plus. Diantre, avait-il 15 ans à nouveau ? Il prit finalement ses vêtements un peu au hasard. Bouarf, cela irait ! Il avait donc revêtu une chemise à jabot (depuis quand il avait ça ?), un pantalon en cuir, et une veste en jean assez élimé. Un peu de maquillage, parce qu’il faut quand même se mettre un peu en valeur. Bolt sentait bien que quelque chose se préparait, et bien sûr qu’il allait emmener son compagnon avec lui !

Tous deux débarquèrent gais et pimpants dans le bar de loups-garous, dénotant probablement pas mal, mais qu’importe ! Le spectacle n’avait pas encore commencé, et Bolt semblait un peu intimidé par les odeurs alors le sorcier prit le chien sur son dos (qu’il était pratique ce harnais) avant d’aller commander un verre de rhum au bar. Puis, il alla s’installer devant la scène, tel une groupie qu’il était probablement. Dès que Luan s’installa, il ne put s’empêcher de sourire. Il posa son verre pour pouvoir l’applaudir.

Il apprécia le concert dès les premières notes. C’était mélancolique. Complètement ce qu’il avait vaguement imaginé. Peut-être pas complètement. C’était beau. Pas du Mozart, mais Mozart, c’est surfait. Il applaudit, sous le charme des notes. Complètement absorbé par le moment hors du temps. La musique avait définitivement ce pouvoir magique. Il était vraiment comme une groupie, captivé par le musicien. Bon sang, il avait définitivement 15 ans à nouveau à admirer un musicien comme ça… Les yeux humides face à l’émotion qui le submergeait, face à toute cette tristesse qui imprégnait sa musique. Il était définitivement trop sensible…


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@Nympheas Oppenheimer  | septembre 2022




Apprendre à gérer ses émotions avait été une longue bataille contre mes instincts humains, puis lupins. Mais au fin des années j'avais réussi à conquérir cette froideur que j'affiche au quotidien. Figure neutre et ton passif, sans nuance, sans saveur, sans aspérités. Un loup endormi, maîtrisé au poil, pour étouffer les éclats de ceux de ma race et surprendre ceux qui ne s'imaginent pas qu'un enfant de la lune puisse être autre chose qu'une personne explosive trop prompte à sortir ses poings et à cracher sa rage au visage des autres. Fut un temps lointain où c'était la marque de fabrique de la meute maternelle, cette passivité hautaine qui nous donnait l'avantage de la surprise lorsque, venue de nulle part, la rage s'embrasait dans nos nerfs, gagnant chaque membre de la meute dans une violence décuplée par la retenue. Le feu qui couve devenu torrent de lave pour dévaster ceux qui avaient mérité leur destruction. Nerea m'avait éduqué avec une main de fer sur ce sujet, en me laissant une seule porte de sortie, la musique. Le seul espace libre où je pouvais laisser s'exprimer la diversité de mes émotions. Leur donné toute la liberté de s'exprimer avec force, envolées et couleurs. Depuis tout petit, la musique avait été mon refuge, mon échappatoire, une singularité cultivée avec amour et reconnaissance de mes pairs. Les loups aiment chanter à la lune, non ?

Ce soir ne fait pas exception à tous les autres, la pression nerveuse provoquée par le concert en approche met mon contrôle des nerfs à rude épreuve. Pola collée contre mon mollet ne bouge que pour resserrer sa présence contre ma jambe. J'ai passé la journée au Street Spice, à servir des clients plus insipides les uns que les autres, l'esprit entièrement tourné vers ce soir. Le message de Nympheas n'avait aidé en rien, au contraire. Sur le moment il m'avait même agacé. A tête reposé, loin de sa présence et de la nuit fraîche de notre rencontre j'avais presque regretté mon invitation. A moins que ce ne soit la nervosité qui plonge toutes mes émotions vers le négatif, ne m'autorisant que l'exaspération et le désintérêt de tout, et de tout le monde. Mon cerveau est un drôle de type qui ne fait pas toujours sens, mais avec lequel je m'accommode en général. Etre exécrable avec les autres ne me dérange pas, même quand j'ai conscience que c'est gratuit et sans raison valable autre que mon humeur interne. Peut-être bien que si je prenais un peu plus le temps de m'écouter et de me poser des questions, j'aurais trouvé l'amorce d'une nervosité intéressée et une peur de déplaire à quelqu'un. Mais ce sont des questions que je ne me pose pas. Subtilement caché derrière mes piques froides, il est plus facile de laisser tout le monde en dehors de mes pensées et de les faire fuir de prime abord, que de devoir gérer les déceptions suivantes. La culpabilité me réussit encore moins.

Mon état d'esprit avant le début du set était aussi tendu que cela. Installé dans l'arrière du bar en attendant que l'heure ne vienne à sonner, j'occupe mes doigts avec un couteau, le lançant à intervalles réguliers contre une poutre en face de moi. Les mêmes gestes en boucle, le poignet qui jette l'arme d'un mouvement rapide et fluide, le son mat de la lame qui se plante, l'épaule qui se décroche du mur pour aller récupérer le manche, tirer, récupérer le couteau, revenir se poser contre le mur, répéter le lancé. Le tout sous le grognement répétitif des serveurs qui passent de temps en temps. Le patron du lieu, après plusieurs remarques, avait fini par laisser tomber en ajoutant un : « Heureusement que tu vises toujours au même endroit sinon je t'aurais fait payer les réparations » qui avait roulé, orageux, dans l'air saturé de la pièce.

Lorsqu'enfin, l'annonce du début du concert se fait, la lame retrouve rapidement son fourreau à ma ceinture, et dans un dernier ajustement des faux-diamants accrochés à mes oreilles, je rejoins l'espace qui m'est réservé. A peine suis-je installé que Pola file entre mes jambes pour disparaitre au milieu des chaises et des tables installées devant moi ce qui ne fait qu'augmenter rapidement mon rythme cardiaque. Un battement de cil vers le haut me fait entrevoir le regard de Nympheas posé sur moi et mes dents se serrent malgré moi. Il est vraiment venu. Cette perspective irradie soudain mes fibres d'un mélange d'amusement et d'une profonde envie de lui prouver que Mozart était peut-être son pote d'un autre temps, mais qu'il ne serait sans doute pas aussi bien côté aujourd'hui qu'il l'était à l'époque. D'ailleurs, peut-être qu'il ne l'était pas ? Est-ce que c'était le genre d'artistes devenus célèbres après leurs morts ? Mes lacunes en matière d'histoire sont trop larges pour répondre à cette question, de toute façon sans importance.

Dès les premières notes qui glissent sur les cordes mon esprit se ferme à l'extérieur, la musique s'enroule entre mes doigts, résonne dans ma chair, vibre dans mes os et mon visage d'ordinaire si placide s'anime de toutes ces émotions finement cachées. Les chansons s'enchaînent, mêlant des reprises en espagnol comme en anglais ainsi que quelques unes de mes propres créations. Je ne prends pas le temps de couper mes chansons d'une présentation inutile, la plupart des clients me connaissent déjà ici. C'est un des bars où je viens le plus souvent, principalement parce que son gérant est un bêta de la meute qui me connait bien, et qu'il semble apprécier mes prestations qui lui ramènent toujours des clients en plus.

Les chansons s'enchainent donc, les accords crissent sur les cordes de la guitare acoustique, et je me laisse glisser entièrement dans ma bulle à faire vivre chaque couplet de mes émotions personnelles, nimbés d'une vérité que mes propres expériences habitent avec justesse, je l'espère. Jusqu'à la dernière note qui vient mourir dans l'air chaud du bar. Les paupières fermées, je reste quelque secondes à faire redescendre mes émotions loin sous les couches de terre et effacer la tristesse latente qui roulait dans mes iris. Peu à peu je reprends conscience de l'atmosphère et du bruit ambiant dans un demi-sourire satisfait. Comme après chaque concert, je me sens apaisé, comme si le loup en moi, heureux d'avoir pu laisser exprimer quelques accents plein de verve, s'était assoupi de contentement. Mon regard glisser vers le sorcier qui n'a pas bougé de sa chaise et qui me regarde avec une expression qui me laisse songer qu'il a lui aussi apprécié le moment. A moins qu'il ne sache parfaitement imiter l'expression émue de celui qui s'est laissé toucher par la musique d'un autre. Comme je l'imaginais, j'aperçois également Pola installée près de lui et de Bolt et mon sourire s'étire un peu plus.

Après avoir rangé mes affaires et remercié l'équipe du bar pour leur confiance, renouvelée, et m'être fait servir une bière fraîche, je viens nonchalamment m'installer sur la chaise libre à côté de Nympheas. « Sympa ta chemise. » Je note en effet le style vestimentaire singulier de l'homme, bien plus apprêté que je ne le suis avec mon haut sombre qui laisse voir mes épaules. Si d'ordinaire je suis plus à l'aise caché sous des vêtements amples, pour mes concerts ici je préfère des vêtements légers dans lesquels je ne risque pas de finir par étouffer sous la chaleur des corps lupins qui ont cette fâcheuse tendance à surchauffer les pièces plus efficacement que n'importe quel feu de cheminée. « Alors, tu en as pensé quoi ? Pas certain que Mozart se sente menacé par moi, mais de toute façon c'est pas tellement le public que je cherche à convaincre non plus. » Encore légèrement habité par l'adrénaline du concert, mon visage laisse passer plus d'émotions qu'à l'accoutumé, dévoilant une palette de sourires plus amusés les uns que les autres et des lueurs dansantes dans mes iris sombres. Repoussé en arrière sur ma chaise, mes longues jambes étendues sous la table, j'attrape ma pinte pour la faire tinter contre le verre du sorcier sans même attendre qu'il s'empare de celui-ci avant de boire une longue et désaltérante gorgée.




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Le rhum n’était pas mauvais. Pas le meilleur qu’il ait goûté, mais pas mauvais. Il l’aidait à éviter de penser trop à la suite de la soirée. Parce que bon, il était lucide, c’était quand même un peu étrange d’être subjugué par un quasi inconnu et de s’enflammer comme il le faisait. A force d’être à cette place, il savait bien que ce n’était ni rationnel, ni très sain mais on ne se refait pas. Bolt se dandinait aussi dans son harnais. Oh, ça voulait dire que Luan et Pola approchaient. Il libéra le chien dans son dos qui clodiqua pour saluer sa congénère avec empressement. Cela lui arracha un sourire.

Merci ! Elle ferait fureur dans une friperie vintage, je pense ! Mais je l’aime bien alors je m’en sépare pas ! Je sais pas depuis quand je la traîne…” avoua-t-il en rigolant un peu.

Et puis, avouons-le, c’est toujours sympa d’avoir des compliments. Quelque part, il ne regrettait pas d’avoir choisi cette pointe d’originalité vu que cela avait déjà attiré l’oeil du chanteur. Une coquetterie pas si futile finalement ! Mais revenons à la musique, c’était quand même le coeur de cette soirée normalement.

“C’était totalement ce que j’avais prévu ! Tu avais vraiment un air de bad boy ténébreux sur scène !” plaisanta le sorcier un peu taquin. “C’était très beau. La musique. Enfin toi aussi, mais ce n’est pas la question, pas vrai ? C’était très mélancolique. J’avoue que je n’ai pas fait attention à toutes les paroles, j’ai lâché l’affaire par moment. Mais Mozart, tu sais, c’est surfait à l’heure actuelle. Et puis, c’est mieux pour un concert, un artiste encore en vie !

Il sirota un peu de son rhum avec son air un peu malicieux. Cet air un peu taquin qui lui était si naturel.

C’était un très beau concert. Je ne regrette absolument pas d’être venu en tous cas ! La prochaine fois, c’est moi qui te ferai découvrir ce que je sais faire ! Je me suis aperçu que j’avais encore un luth ! Tu te sentiras très doué je suis sûr !

Il termina son verre -au fond, il était un peu petit, non ? Il fit signe à un serveur de leur remettre la même à tous les deux. Parce que la boisson, ça se partage. Peut-être que c’était cette générosité sans grande limite qu’il n’arrivait pas à garder une grande fortune au fil des âges. Mais bon, l’argent, c’est fait pour être dépensé, non ? Il offrit une caresse à Bolt qui était revenu à ses pieds. Puis son regard revint sur l’artiste.

Et toi, tu as apprécié ? Je note que tu viens de sourire, donc, j’en déduis que probablement… Tu avais l’air vraiment dans un autre monde quand tu jouais. J’envie un peu cette flamme qui t’anime.

Peut-être que ce n'était pas une bonne chose de lui faire remarquer son sourire, mais c’était fait avec bienveillance. Il avait comme l’impression que la musique faisait se fendiller la carapace qu’il avait deviné autour du chanteur. Ce n’était pas déplaisant de voir quelques brèches.


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@Nympheas Oppenheimer  | septembre 2022




Comme lors de notre dernière – et première – rencontre, Nympheas semble exalté d’être là. J’en déduis donc qu’il s’agit bien là de son état naturel et non d’un hasard du moment. Pourtant ce soir son enthousiasme ne heurte pas ma patience, pour le moment du moins. Je suis moi-même encore légèrement pris par l’euphorie du concert et de l’endorphine qui pétille dans mes veines. Aussi je l’écoute, observant les sourires taquins qui glissent sur ses lèvres, détaillant la façon qu’il a de siroter son verre de whisky avec détachement et une certaine efficacité latente. Les dernières gorgées sont avalées avant même que je n’ai eu le temps de répliquer quoi que ce soit en réponses à ses compliments et son retour détaillé de ma musique. Son allusion à mon air de bad boy m’arrache un léger sourire en coin qui se perd dans une gorgée de ma propre pinte pour m’aider à ravaler la gêne qui aurait voulu s’immiscer dans ma gorge. Les pensées s’accrochent un instant sur l’information qui a filtré entre plusieurs autres choses : il me trouve beau ? J’ai beau tenté de chasser cette partie-là de son discours pour rester focaliser sur son appréciation de la musique en elle-même, les mots tapotent désagréablement dans un coin de ma tête comme un chien qui gratte à la porte pour sortir.  

Je continue de l’écouter, un sourire sur les lèvres, les yeux encore vibrants tout en descendant en toute tranquillité la bière qui se réduit à vue d’œil. Je ne suis pas un grand buveur d’alcool, après avoir été confronté toute son enfance à ses ravages dans son quotidien on devient plus facilement frileux à tomber dans les mêmes pièges. Pour mon cas en tout cas. Mais la soif provoquée par le concert et les chansons successives suffit à faire un sort remarquable à cette pinte de blonde légère. J’arque un sourcil surpris quand Nympheas évoque l’idée de me montrer ses propres talents de joueur de luth. Un instrument bien singulier que je n’ai jamais eu l’occasion d’observer ailleurs que dans des illustrations de très lointains livres scolaires de primaire. Ma curiosité est titillée, immanquablement, comme l’autre soir quand il avait parlé de cuisine. Décidément, les gens ont bien souvent du mal à trouver des choses pour attirer mon attention, et voilà que le sorcier en quelques conversations anodines et hasardeuses tombe deux fois dans le mille. Il y a de quoi être intrigué, et toujours un peu plus suspicieux. Même si mes quelques recherches discrètes ne m’ont pas permises de mettre à jour des liens quelconque entre le sorcier et des milieux douteux, je ne peux pas encore effacer entièrement cette hypothèse. Je n’aurais pas fait long feu seul à Bogota à quatorze ans si ça avait été le genre d’erreur que je suis capable de faire. Sans rien dire ni changer d’attitude je l’observe commander un deuxième tour de boissons. Est-ce qu’il veut juste profiter du moment en charmante compagnie - ce dénominatif est rapidement refoulé – ou bien cherche-t-il à me faire boire pour tenter de faire baisser ma garde ?  

Quand il reprend la parole pour souligner mon sourire celui-ci se modifie légèrement pour devenir plus cynique que chaleureux. « Tu m’envies ma flamme ? Tu as pas l’air d’avoir besoin d’une flamme pour t’animer, tu es déjà d’un enthousiasme débordant pour tout et rien. » Sans oublier que lui, contrairement à moi, est véritablement habité par une flamme, démoniaque, qu’il maîtrise sur le bout des doigts. Le jeu de mot m’arrache un léger souffle de nez amusé en souvenir de son pouce-briquet de l’autre soir. Je suis décidément beaucoup trop détendu. « Merci pour la musique, tant mieux si ça t’a plu. C’est vrai que c’est un espace où je me permets un peu plus de liberté. Si c’était pas le cas, mes concerts seraient aussi plats et chiants que moi au quotidien. Ca ferait pas venir grand monde. » Un éclair narquois traverse mon regard accroché à celui de Nympheas. Ces yeux ont définitivement quelque chose de magnétique et il n’est pas si facile de s’en détacher sans avoir envie de les retrouver. « Tu as un Luth donc. Aussi vintage que ta chemise ça. Ca me rend curieux de voir comment tu te débrouilles avec. Tu arriveras peut-être à réanimer ton pote Mozart qui se retournera dans sa tombe, qui sait. » Ma pinte est aux trois quarts terminés quand le serveur revient avec le deuxième tour de boisson, sauf qu’au lieu de se contenter de déposer les verres, il me tend également une carte avant de me désigner d’un coup de tête une personne de dos accoudée au comptoir. Mes yeux se lèvent très légèrement avant de disparaitre dans la lecture des quelques mots inscrits. Le visage se lisse, retrouvant sa neutralité habituelle. Encore cette louve et cette mission urgente. Une ligne de menaces, des injonctions, la précipitation d’une écriture couchée, marquée de points appuyés et de traits rageurs. Elle n’a visiblement pas apprécié le rendez-vous manqué et mon absence de nouvelle. Tant pis pour elle. Avec l’indécence de rester sur la même longueur d’onde, je range la carte dans ma poche sans lui accorder un regard, posant un nouveau regard éclatant sur Nympheas avant de reprendre la conversation là où je l’avais laissée « Si tu joues si mal que devait l’être ton espagnol vieux d’un siècle, je m’inquiète pas tellement. » Dans le pire des cas, je pourrais être tenter de lui confisquer l’instrument pour arrêter le massacre, et m’essayer à mon tour sur cet ancêtre de la guitare.  



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Nympheas Oppenheimer
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Oui, il lui enviait sa flamme. Peut-être parce que la sienne brûlait depuis trop longtemps ? Peut-être parce qu’il ne laissait voir à Luan que l’aspect positif de sa personnalité. Il n’était pas toujours si joyeux. Cela faisait même longtemps qu’il n’avait pas été si heureux de passer du temps avec quelqu’un. Parce que parfois, la vie si longue paraît répétitive. Luan avait cette flamme nouvelle dans laquelle il voulait se jeter. Il voulait brûler avec lui. C’était franchement pas rationnel comme envie mais ça le faisait se sentir tellement vivant. Tellement plus vivant que depuis une bonne décennie. En même temps, c’est souvent ça, on ne rencontre pas quelqu’un de marquant chaque jour que la vie fait. Il y a des cycles.

Depuis le temps que ma flamme brûle, elle a perdu de sa splendeur, tu sais. Et puis, je suis pas toujours aussi enthousiaste.” justifia-t-il avec un petit rire. “Puis, toi, tu es un vrai artiste. Moi pas du tout. Je suis juste un amuseur. C’est différent. Je divertis les gens, toi, tu les fais voyager bien plus loin.

Il était sincère. Et l’authenticité de Luan le touchait au plus profond de son être. Il ne jouait pas un personnage. ça se voyait. Contrairement à lui qui avait porté tellement de masques qu’il ne savait même plus vraiment qui il était. Bien trop habitué à jouer le rôle du bouffon. Bien trop à son aise dans ce rôle.
Bien trop lassé de ce rôle en même temps. Les paradoxes sont souvent partout.

J’ai du mal à t’imaginer comme quelqu’un de plat… Je crois que tu sous-estime ton charisme naturel, jeune homme !” s’amusa-t-il à faire remarquer.

Il acquiesça aux affirmations. Un luth oui. Peut-être même une vielle à roue, cachée dans une de ses multiples planques à travers le monde. Mais allez savoir où. Il n’était pas assez organisé pour la vie de vagabond. Il oubliait souvent où il planquait ses affaires d’une décennie à une autre. ça devait faire le plaisir des chasseurs d’antiquités…

Je te ferai une démonstration, promis…. Tu sais, Mozart jouait surtout de clavecin. Mais bon, pas impossible que si je massacre un de ses morceaux, il décide de me foutre un pain depuis l’outretombe !

Nympheas attrapa son nouveau verre avec entrain, mais nota aussi le manège du serveur. Il regarda au bar, voyant une femme à l’air peu avenant. Qu’est-ce qu’elle voulait au chanteur ? Elle avait des plaintes sur sa performance ? Ou c’était totalement autre chose. Probablement autre chose. Il regarda Luan, qui semblait vraiment imperturbable, mais bien plus froid. C’était fou ce masque de froideur qu’il pouvait prendre. Nympheas préférait de loin son sourire.

Hm… C’est plus que je ne suis pas un grand interprète, je joue, mais… Je n’ai pas le truc en plus qui fait un bon musicien. Je suis sûr que toi, tu feras des merveilles en t’entraînant un peu !

Il but une gorgée de son verre, et après une légère hésitation, osa tout de même.

Un souci avec la dame au bar ? Je suis pas très doué en baston, mais si je peux t’aider… Je connais quand même deux ou trois sorts utiles pour se sortir des embûches.

Pas qu’il ait très envie de se mettre quelqu’un à dos mais, il avait encore moins envie de savoir Luan avoir des problèmes quels qu’ils soient.

Sinon, je peux aussi nous exfiltrer discrètement avec un portail. C’est aussi une bonne solution. Je crois que c’est ma solution préférée en générale. Je suis pas forcément très courageux.



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Luan Orozco
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Je l’observe avec une attention plus marquée tant j’essaie de paraître imperturbable pour la louve qui doit nous regarder encore. Je veux lui faire comprendre que sa démarche intrusive m’agace et que je ne suis pas d’humeur à me frotter à ce côté-là de ma vie. Détaillant plus intensément que précédemment les infimes variations des émotions sur le visage de Nympheas, je perçois la légère hésitation qui s’y glisse. Comme la caresse d’une feuille tombant à la surface d’eau eau calme, de légères ondulations qui viennent troubler la légèreté du moment passé. Une autre raison pour laquelle l’intervention de la femme m’est désagréable. Les deux réalités que j’essaie de garder les plus éloignées possibles l’unes de l'autre sont en train de se frôler, et je déteste ça. Ça ne devrait pas me poser autant problème que ce soit en présence du sorcier, et pourtant ça l’est tout particulièrement. Ce soir, lui plus qu’un autre, cela me dérange. Peut-être bien que je voudrais qu’il ne garde de moi que cette image de flamme passionnée qu’il dit sentir en moi. Peut-être bien que je préfère cette vision-là, et les lueurs douces qui brillent dans ses yeux quand il en parle pour tenter de m’en convaincre moi aussi. Peut-être même, qu’une légère épine à pousser, griffant une crainte irrationnelle de le voir changer de posture pour un regard affolé. Ou pire, dégoûté. Ces considérations ne devraient pas être importantes. Je les repousse d’une pression de canine dans l’intérieur de la joue quand Nympheas ose poser la question qui le dérangeait.

Je hausse les épaules, une seule fois, avant de porter ma bière à mes lèvres pour boire une longue gorgée faussement désintéressée. Je n’ai pas l’intention de me battre, encore moins d’impliquer le sorcier dans cette histoire, encore moins de laisser sous-entendre que ce dernier est quelqu’un qui compte, encore moins ici au milieu de la meute où je suis loin d’être un inconnu. Encore moins pour une raison aussi peu légale que le type de rendez-vous qu’elle voudrait me proposer. Mon regard se fait involontairement plus dur, perdant les éclats d’enthousiasme que le concert précédent avait allumés. Je fini même par secouer la tête, visiblement agacé, avant de repousser très légèrement la chaise d’un coup de talon. « Vous êtes pas tellement réputés pour votre courage, ouais je sais. » Je glisse vers l’amertume, injustement dirigée vers lui, et j’en prends conscience au même moment où ma phrase s’échappe, mauvaise, de ma gorge.   « T’en fais pas pour moi va, c’est rien d’important. Ca me fait juste chier qu’elle vienne me saouler maintenant pour une connerie. Et elle pas tellement intérêt à déclencher une baston avec moi, et elle le sait très bien. Tu risques rien. »  La dernière remarque est ponctuée d’une tonalité plus chaude qu’un sourire amusé vient également réchauffer. D’une nouvelle levée de coude je finis ma première bière avec un soupir. Je dépose le contenant vide sur la table avant de venir caresser la tête de Pola qui est revenue un court instant la poser sur mes jambes. Comme si elle avait perçu mon changement d’humeur à la seconde même où l’agacement s’était fait plus fort. « Mais j’ai bien compris que tu cherchais toutes les excuses possibles pour essayer de m’attirer chez toi. Nympheas. J’suis peut-être con sur les bords, mais t’avais plus de chance en me parlant musique, qu’en me proposant de fuir comme un lâche. »  Il n’y pas d’animosité dans ma remarque cette fois, seulement une tournure souple d’une douce moquerie, sous l’égide d’un regard qui s’est fait plus perçant. « J’suis pas d’accord, avec ce que tu dis. » Je marque une courte pause, cherchant les mots qui conviendraient le mieux, sans accepter de reconnaître que j’ai réellement envie de lui faire savoir que je ne suis pas d’accord avec la vision trop négative qu’il a de ses propres talents. « Je suis pas d’accord, t’as un certain talent que tu devrais pas te déprécier comme ça. Faut une sacrée dose de talent et d'imagination pour arriver à divertir les autres, surtout après toutes ces années. C’est même le plus important, d’être assez généreux pour donner de la joie aux autres, au détriment de soi. J’ai toujours été impressionné par ceux qui sont capables de ça. Entretenir la flamme de l’espoir, toutes ces belles choses. C’est tout ce que j’sais pas faire.  » Si sa flamme est, en effet, de celle qui ne s’éteint jamais, même sur la longueur, et brille toujours, même infime, comme une lueur de promesse d’un demain dans le lointain. La mienne n’est qu’un feu de paille, qui brûle trop vite, consume, détruit, et ne laisse que des champs de cendre ternes.




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